Prière pour savoir prier

Prière du Bienheureux Charles de Foucauld (1858-1916) extraite de ses Écrits spirituels.

 

Mon Seigneur Jésus... prier, c'est Vous regarder, et puisque Vous êtes toujours là, puis-je, si je vous aime vraiment, ne pas Vous regarder sans cesse ?

Celui qui aime et qui est en face du Bien-Aimé peut-il faire autrement que d'avoir les regards attachés sur Lui ?...

« Apprenez-nous à prier », comme disaient les Apôtres !...

Oh ! mon Dieu, le lieu et le temps sont bien choisis : je suis dans ma petite chambre, il fait nuit, tout dort, on n'entend que la pluie et le vent, et quelques coqs lointains qui rappellent, hélas ! la nuit de votre Passion...

Enseignez-moi à prier, mon Dieu, dans cette solitude, dans ce recueillement...

- Oui, mon enfant, il faut prier sans cesse, prie en faisant tout ce que tu fais : lisant, travaillant, marchant, mangeant, parlant, il faut toujours m'avoir devant les yeux, me regarder sans cesse, et me parler plus ou moins, suivant que tu le peux, mais me regardant toujours.

L'oraison est l'entretien familier de l'âme avec Dieu ; l'oraison ne contient que cela ; l'oraison ne renferme ni méditation proprement dite, ni prières vocales, mais elle accompagne, dans un degré plus grand ou moindre, l'une et l'autre.

- La méditation, c'est la réflexion attentive sur quelque vérité ou quelque devoir que l'esprit cherche à approfondir aux pieds de Dieu. La méditation est toujours plus ou moins mélangée d'oraison, car il faut nécessairement appeler Dieu à son aide de temps en temps pour connaître ce qu'on cherche ; et aussi pour jouir de sa présence et ne pas rester longtemps si près de Lui sans Lui dire aucune parole de tendresse...

- Tes prières vocales, office canonial, rosaire, chemin de croix me plaisent, m'honorent, j'approuve que tu les dises, elles sont un petit bouquet que tu m'offres, un très beau et très divin cadeau quoique tu sois très petit...

« Tu es un tout petit enfant, mais dans ma bonté, je te permets de cueillir, dans mon merveilleux jardin, les plus belles roses pour me les offrir, de sorte que, tout petit que tu es, en une demi-heure ou trois-quarts d'heure, et surtout en un peu plus, tu me fais un merveilleux bouquet... tu me comprends ?...

Et ce bouquet me plaît de tes mains, mon chéri, mon bon chéri, parce que, bien que tu sois tout petit et plein de défauts, tu es mon enfant et, par conséquent, je t'aime ; je t'ai créé pour le ciel ; mon Fils unique t'a racheté de Son sang, t'a fait encore plus mon enfant, t'a adopté pour frère ; je t'aime, et puis, enfin, tu as écouté Sa voix et tu peux te dire que j'ai dit moi-même : « Si je t'ai tant aimé quand tu ne me connaissais pas, à plus forte raison, maintenant que, tout pauvre et pécheur que tu es, tu désires me plaire. »

Tu le vois, bien que je sois bien grand, et toi bien petit ; bien beau et toi bien laid ; bien riche et toi bien pauvre ; bien sage et toi bien ignorant, cependant je tiens à ton bouquet quotidien, à tes roses du matin et du soir ; j'y tiens parce que ces roses que je te permets de cueillir dans mon jardin sont belles et j'y tiens parce que je t'aime, tout petit et tout mauvais que tu es, mon petit enfant.

- Merci, merci, mon Dieu ! Que Vos paroles sont douces et qu'elles sont claires, et comme je vois bien ce que je n'avais pas vu du tout !...

Merci, merci, mon Dieu ! comme vous êtes bon !... »