"Je veux être chrétien"
Chers frères et sœurs, bonjour !
Nous commençons aujourd’hui une série de catéchèses sur les sacrements, et la première concerne le baptême. Par une heureuse coïncidence, dimanche prochain est précisément la fête du Baptême du Seigneur.
Le concept de « sacrement » se trouve au cœur de la foi chrétienne et renvoie à un événement de grâce, dans lequel Dieu se rend présent et agit dans notre vie. Le Concile Vatican II, au début de la Constitution sur l’Église, affirme que : « L’Église est, dans le Christ, en quelque sorte le “sacrement”, c’est-à-dire à la fois le signe et le moyen de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain » (Lumen gentium, n. 1). Cela signifie alors que les sept sacrements prennent forme dans l’Église elle-même, qui, comme sacrement universel, prolonge dans l’histoire l’action salvifique et vivifiante du Christ. C’est Lui qui, avec la force du Saint-Esprit, régénère sans cesse la communauté chrétienne et l’envoie dans le monde pour apporter à tous le salut à travers les paroles et les gestes, à travers la prédication et les sacrements.
1.
Avec l’Eucharistie et la confirmation, il forme ce qu’on appelle l’« initiation chrétienne », qui constitue comme un unique grand événement sacramentel qui nous configure au Seigneur et fait de nous un signe vivant de sa présence et de son amour.
Mais une question peut naître en nous : le baptême est-il vraiment nécessaire pour vivre en chrétiens et suivre Jésus ? N’est-ce pas au fond un simple rite, un acte formel de l’Église pour donner un nom au petit garçon ou à la petite fille. C’est une question qui peut apparaître. Et à ce propos, ce qu’écrit l’apôtre Paul nous éclaire : « Ne le savez-vous donc pas : nous tous, qui avons été baptisés en Jésus Christ, c'est dans sa mort que nous avons été baptisés ? Si, par le baptême dans sa mort, nous avons été mis au tombeau avec lui, c'est pour que nous menions une vie nouvelle, nous aussi, de même que le Christ, par la toute-puissance du Père, est ressuscité d'entre les morts » (Rm 6, 3-4). Ce n’est donc pas une formalité ! C’est un acte qui touche notre existence en profondeur. Un enfant baptisé ou un enfant non baptisé, ce n’est pas la même chose. Une personne baptisée ou une personne non baptisée, ce n’est pas la même chose. Avec le baptême, nous sommes plongés dans cette source intarissable de vie qui est la mort de Jésus, le plus grand acte d’amour de toute l’histoire ; et grâce à cet amour, nous pouvons vivre une vie nouvelle, n’étant plus en proie au mal, au péché et à la mort, mais dans la communion avec Dieu et avec nos frères.
2. Un grand nombre d’entre nous n’ont pas le moindre souvenir de la célébration de ce sacrement, et cela est normal, si nous avons été baptisés peu après notre naissance. J’ai posé cette question deux ou trois fois, ici, sur la place : que celui d’entre vous qui connaît la date de son baptême lève la main. Il est important de connaître le jour où j’ai été plongé précisément dans ce courant de salut de Jésus. Et je me permets de vous donner un conseil. Mais, plus qu’un conseil, un devoir pour aujourd’hui. Aujourd’hui, à la maison, cherchez, demandez la date de votre baptême et ainsi vous connaîtrez bien le si beau jour du baptême. Connaître la date de notre baptême signifie connaître une date heureuse. Mais le risque de ne pas la savoir est de perdre conscience du souvenir de ce que le Seigneur a fait en nous, la mémoire du don que nous avons reçu. Alors nous finissons par le considérer seulement comme un événement qui a eu lieu dans le passé — même pas par notre volonté, mais par celle de nos parents —, et qui pour cette raison n’a plus aucune incidence sur le présent. Nous devons réveiller la mémoire de notre baptême. En revanche, nous sommes appelés à vivre notre baptême chaque jour, comme la réalité actuelle de notre existence. Si nous réussissons à suivre Jésus et à rester dans l’Église, malgré nos limites, et avec nos fragilités et nos péchés, c’est précisément à cause du sacrement dans lequel nous sommes devenus de nouvelles créatures et nous avons été revêtus du Christ. C’est en vertu du baptême, en effet, que, libérés du péché originel, nous sommes greffés dans la relation de Jésus avec Dieu le Père; que nous sommes porteurs d’une espérance nouvelle, car le baptême nous donne cette espérance nouvelle : l’espérance d’aller sur la route du salut, toute la vie. Et cette espérance, rien ni personne ne peut l’éteindre, car l’espérance ne déçoit pas. Rappelez-vous : l’espérance dans le Seigneur ne déçoit jamais. C’est grâce au baptême que nous sommes capables de pardonner et d’aimer aussi ceux qui nous offensent et nous font du mal ; que nous réussissons à reconnaître chez les derniers et chez les pauvres la face du Seigneur qui nous rend visite et se fait proche. Le baptême nous aide à reconnaître sur le visage des personnes dans le besoin, chez ceux qui souffrent, également de notre prochain, la face de Jésus. Tout cela est possible grâce à la force du baptême !
3. Un dernier élément qui est important. Et je pose la question : une personne peut-elle se baptiser elle-même ? Personne ne peut se baptiser tout seul ! Personne. Nous pouvons le demander, le désirer, mais nous avons toujours besoin de quelqu’un qui nous confère ce sacrement au nom du Seigneur. Car le baptême est un don qui est accordé dans un contexte de sollicitude et de partage fraternel. Toujours dans l’histoire, l’un baptise l’autre, l’autre, l’autre... C’est une chaîne. Une chaîne de grâce. Mais je ne peux pas me baptiser tout seul : je dois demander le baptême à un autre. C’est un acte de fraternité, un acte de filiation à l’Église. Dans sa célébration du baptême, nous pouvons reconnaître les traits les plus authentiques de l’Église, qui comme une mère continue à engendrer de nouveaux enfants en Christ, dans la fécondité du Saint-Esprit.
Demandons alors de tout cœur au Seigneur de pouvoir toujours faire davantage l’expérience, dans la vie de chaque jour, de cette grâce que nous avons reçue avec le baptême. En nous rencontrant, nos frères peuvent rencontrer de véritable fils de Dieu, de véritables frères et sœurs de Jésus Christ, de véritables membres de l’Église. Et n’oubliez pas le devoir d’aujourd’hui : chercher, demander la date de votre baptême. Comme je connais la date de ma naissance, je dois aussi connaître la date de mon baptême, car c’est un jour de fête.
Chers frères et sœurs, bonjour.
Mercredi dernier, nous avons commencé un bref cycle de catéchèses sur les sacrements, en commençant par le baptême. Et je voudrais m’arrêter sur le baptême aujourd’hui aussi, pour souligner un fruit très important de ce sacrement : il fait de nous des membres du Corps du Christ et du Peuple de Dieu. Saint Thomas d’Aquin affirme que celui qui reçoit le baptême est incorporé au Christ presque comme son membre même et est uni à la communauté des fidèles (cf. Summa Theologiae, III, q. 69, art. 5 ; q. 70, art. 1), c’est-à-dire au peuple de Dieu. A l’école du Concile Vatican ii, nous disons aujourd’hui que le baptême nous fait entrer dans le peuple de Dieu, il fait de nous des membres du Peuple en chemin, un peuple en pèlerinage dans l’histoire.
En effet, de même que de génération en génération se transmet la vie, ainsi, de génération en génération, à travers la renaissance aux fonts baptismaux, se transmet la grâce, et avec cette grâce, le peuple chrétien marche dans le temps, comme un fleuve qui irrigue la terre et diffuse dans le monde la bénédiction de Dieu. À partir du moment où Jésus a dit ce que nous avons entendu dans l’Évangile, les disciples sont allés baptiser ; et depuis cette époque jusqu’à aujourd’hui, il existe une chaîne de transmission de la foi à travers le baptême. Et chacun de nous est un anneau de cette chaîne : un pas en avant, toujours ; comme un fleuve qui irrigue. Ainsi est la grâce de Dieu et ainsi est notre foi, que nous devons transmettre à nos enfants, transmettre à nos petits-enfants, afin que, devenus adultes, ils puissent la transmettre à leurs enfants. Tel est le baptême. Pourquoi ? Parce que le baptême nous fait entrer dans ce peuple de Dieu qui transmet la foi. Cela est très important. Un peuple de Dieu qui marche et transmet la foi.
En vertu du baptême, nous devenons disciples missionnaires, appelés à apporter l’Évangile dans le monde (cf. Exhort. apost. Evangelii gaudium, n. 120). « Chaque baptisé, quelle que soit sa fonction dans l’Église et le niveau d’instruction de sa foi, est un sujet actif de l’évangélisation... La nouvelle évangélisation doit impliquer que chaque baptisé soit protagoniste d’une façon nouvelle » (ibid.) de tous, de tout le peuple de Dieu, que chacun des baptisés soit protagoniste d’une façon nouvelle. Le peuple de Dieu est un peuple disciple — parce qu’il reçoit la foi — et missionnaire — parce qu’il transmet la foi. Et c’est ce qu’opère le baptême en nous : il nous donne la Grâce et transmet la foi. Dans l’Église, nous sommes tous disciples, et nous le sommes pour toujours, pour toute la vie ; et nous sommes tous missionnaires, chacun à la place que le Seigneur lui a assignée. Tous: le plus petit est également missionnaire ; et celui qui semble plus grand est disciple. Mais certains d’entre vous diront : « Les évêques ne sont pas disciples, les évêques savent tout ; le Pape sait tout, ce n’est pas un disciple ». Non, les évêques et le Pape doivent eux aussi être des disciples ; parce que s’ils ne sont pas disciples, ils ne font pas le bien, ils ne peuvent être missionnaires, ils ne peuvent transmettre la foi. Nous sommes tous disciples et missionnaires.
Il existe un lien indissoluble entre la dimension mystique et celle missionnaire de la vocation chrétienne, toutes deux enracinées dans le baptême. « En recevant la foi et le baptême, les chrétiens accueillent l’action de l’Esprit Saint qui conduit à confesser Jésus comme Fils de Dieu et à appeler Dieu “Abba”, Père. Tous les baptisés et baptisées... sont appelés à vivre, et à transmettre la communion avec la Trinité, puisque l’évangélisation est un appel à la participation et à la communion trinitaire» (Document final d’Aparecida, n. 157).
Personne ne se sauve seul. Nous sommes une communauté de croyants, nous sommes peuple de Dieu et dans cette communauté, nous faisons l’expérience de la beauté de partager l’expérience d’un amour qui nous précède tous, mais qui, dans le même temps, nous demande d’être des « canaux » de la grâce les uns pour les autres, en dépit de nos limites et de nos péchés. La dimension communautaire n’est pas seulement un « cadre », un « contour », mais elle est partie intégrante de la vie chrétienne, du témoignage et de l’évangélisation. La foi chrétienne naît et vit dans l’Église, et dans le baptême, les familles et les paroisses célèbrent l’incorporation d’un nouveau membre au Christ et à son corps qui est l’Église (cf. ibid., n. 175b).
À propos de l’importance du baptême pour le peuple de Dieu, l’histoire de la communauté chrétienne au Japon est exemplaire. Elle subit une dure persécution au début du XVIIe siècle. Il y eut de nombreux martyrs, les membres du clergé furent expulsés et des milliers de fidèles furent tués. Aucun prêtre n’est resté au Japon, tous ont été expulsés. Alors, la communauté se retira dans la clandestinité, en conservant la foi et la prière de façon cachée. Et lorsque naissait un enfant, le papa ou la maman le baptisait, parce que tous les fidèles peuvent baptiser dans des circonstances particulières. Lorsque, après environ deux siècles et demi, 250 ans plus tard, les missionnaires retournèrent au Japon, des milliers de chrétiens sortirent de la clandestinité et l’Église put refleurir. Ils avaient survécu avec la grâce de leur baptême ! Cela est grand : le peuple de Dieu transmet la foi, baptise ses enfants et va de l’avant. Et ils avaient maintenu, même dans le secret, un profond esprit communautaire, parce que le baptême les avaient fait devenir un seul corps dans le Christ : ils étaient isolés et cachés, mais ils étaient toujours membres du peuple de Dieu, membres de l’Église. Nous pouvons apprendre beaucoup de cette histoire !
Pape François
Audiences générales des mercredis 8 et 15 janvier 2014