Pourquoi des diacres parmi nous ?

Catéchèse de Mgr Jean-Pierre Ricard, à l'occasion du 50ème anniversaire du rétablissement du diaconat permanent lors du concile Vatican II.

Il y a exactement cinquante ans, le 29 octobre 1963, le concile Vatican II décidait de rétablir le diaconat comme un ordre permanent dans l’Église. Au cours de l’histoire, ce ministère était devenu une étape, la dernière, dans la préparation à l’ordination presbytérale. Le Concile a pensé qu’à côté du ministère de prêtre, celui de diacre pouvait avoir son originalité et son utilité. Beaucoup de Pères du Concile se demandaient d’ailleurs si ce ministère ne conviendrait pas bien aux catéchistes africains, chefs de communauté. En fait, la mise en œuvre du diaconat par l’Église devait déjouer ces pronostics. Le diaconat permanent allait se développer plutôt en Europe et en Amérique du Nord et très peu en Afrique. On le voit : l’Église se laisse habiter par une intuition spirituelle, puis fait confiance à la vie et se laisse instruire par l’expérience.

Combien de diacres ?

Il y a actuellement autour de 42.000 diacres dans le monde, 2.500 en France et 29 dans le diocèse de Bordeaux. Le premier, André Saunier a été ordonné le 16 avril 1983. Un candidat au diaconat devrait être ordonné en 2014 pour notre diocèse et une petite dizaine sont en préparation.

“ Les diacres sont signes du Christ Serviteur, serviteur de son Père et serviteur des hommes ”

Qui sont les diacres ?

Sont appelés aujourd’hui des hommes mûrs. Il faut avoir au moins 35 ans pour être diacre et 10 ans de mariage pour ceux qui sont mariés. En effet, le concile Vatican II a autorisé l’ordination d’hommes mariés. 92% de diacres le sont et 8% sont célibataires, chacun devant rester dans son état après l’ordination. Les diacres veufs ne doivent pas normalement se remarier. Tous ces hommes ont une profession et vivent de leur traitement. Pour l’ordination, l’accord de l’épouse et l’acquiescement des enfants sont demandés. Souvent mariés, ayant une famille, travaillant professionnellement, présents dans la vie associative, les diacres dessinent une figure originale du ministère ordonné.

Qu'apporte à l'Église le diaconat permanent ?

Mais pourquoi y a-t-il des diacres dans l’Église ? On répond souvent : pour l’aide qu’apporte le diacre à la vie ecclésiale : prêcher, baptiser, marier…En fait, la vraie réponse est ailleurs. Le diaconat est un ministère. Or, les ministères ne se réduisent pas à des choses à faire. Ils sont par eux-mêmes signes. Ils renvoient au Christ, comme celui qui convoque, rassemble son Peuple et se rend mystérieusement présent à lui. Les diacres ont une fonction symbolique et sacramentelle profonde : ils sont signes du Christ Serviteur, serviteur de son Père et serviteur des hommes. Leur ministère doit évoquer, signifier, servir, actualiser pour tous aujourd’hui l’image de celui qui est par excellence le Serviteur : le Christ. Dans l’Évangile, on voit Jésus aller à la rencontre des foules, des malades, des pécheurs, des exclus de toutes sortes. Il vient leur offrir cet amour du Père qui les rejoint et leur dire qu’ils sont les invités au repas de noces. Les diacres doivent rappeler à toute l’Église qu’elle ne sera vraiment l’Église du Christ que si elle suit son Seigneur, que si, sortant de ses cénacles, elle va à la rencontre des hommes. Par leur ministère, souvent auprès de ceux qui sont loin de l’Église, les diacres doivent inviter à rejoindre ces « périphéries existentielles », dont parle souvent le pape François. En un sens, les diacres, pendant toute la durée de leur vie professionnelle, sont plus dans la lignée des prêtres au travail que dans celle des vicaires de paroisse ! Une fois qu’ils sont à la retraite, les diacres ont alors plus de temps pour s’investir dans le service des communautés chrétiennes.

Dans la sphère professionnelle et sociale qui est la sienne, le diacre, dans son témoignage, engage plus que lui-même. D’une certaine façon, il engage l’Église et offre une présence de l’Église auprès de ceux avec qui il travaille ou qui croisent sa route. Ceux-ci, d’ailleurs, ne s’y trompent pas et s’adressent à lui en conséquence.

Étre diacre, c'est répondre à un appel de Dieu

Le diaconat est une vraie vocation, la réponse à un appel de Dieu qui bouleverse une vie. Car, même si les activités des diacres peuvent changer ou se réduire à tel ou tel moment de la vie, on reste diacre pour toute la vie. Cela marque une existence. Cet appel, le diacre le découvre en lui. Pour beaucoup, cette découverte a été le fruit d’une interpellation. Un prêtre, un conseil pastoral, une équipe d’animation pastorale ont posé à quelqu’un la question : pourquoi ne penserais-tu pas au diaconat ? Et l’interrogation a fait son chemin dans le cœur de l’intéressé et au sein de son couple s’il est marié. S’il répond positivement, une année de discernement lui est proposée, puis quatre années de formation (avec un week-end par mois) vont l’aider à mûrir sa réponse. L’Église, ensuite, reconnaît cet appel de Dieu en l’appelant officiellement à recevoir l’ordination diaconale. L’évêque confie alors au nouveau diacre une mission, qui pourra d’ailleurs prendre de nouveaux visages au cours des ans.

Même si nous n’avons pas encore, en Église, pris toutes les dimensions de ce qu’est ce ministère des diacres, Dieu nous a déjà devancés sur cette voie. Il appelle aujourd’hui des baptisés à ce service. Comme tout ministère, le diaconat est une véritable grâce pour toute l’Église.

† Jean-Pierre cardinal Ricard

Archevêque de Bordeaux, évêque de Bazas

 

Il y a 50 ans

Le 29 octobre 1963, au cours du débat sur l’Église, les Pères du concile répondent très favorablement à la question sur «  l’opportunité d’instaurer le diaconat comme degré distinct et permanent du saint ministère, selon les besoins de l’Église dans les diverses contrées ».

50 ans après, découvrez la situation du diaconat permanent en France avec le rapport publié par la conférence des évêques de France en 2012